Hadji : "Je ne compte pas rentrer au Bled"
J'ai eu le plaisir de connaitre une jeune journaliste egyptienne qui réside en France,culte,motivée,curieuse.
Elle veut tout changer...interessée par le sujet de l'immigration,Noura Dardir essaye de décrire la situation des immigrés en France (egyptiens,algériens,marocains,chinois...etc), Hadji,Hussein,Ashraf et d'autres,sont des immigrés(sans papiers) que Noura rencontrérent,une tragédie,une vie difficile... voici leur histoire:
Dimanche soir. Je me promène tard le soir. Hadji, un jeune Algérien m'arrête. On discute. Il me raconte son histoire. Je l'écoute. Ça me rappelle d'autres histoires que j'ai entendues. Toutes en France. La plupart à Paris. Voici mon témoignage.
"Je suis venu il y a trois ans en France et je ne suis jamais rentré au Bled ". C'est ce que m'a raconté Hadji. Un jeune sans-papiers en France. Il n'est pas le seul. Plusieurs sont comme lui. Maghrébins, Egyptiens, Japonais ou Chinois. Tous vivent dans des conditions déplorables. Cinq dans un petit appartement. Ils se partagent le loyer. La plupart travaille dans le bâtiment. Un métier très demandé en France. Et par manque de main d'oeuvre française dans ce domaine, les étrangers les remplacent. Clandestinement. D'autres cherchent toujours un travail. Mais pour l'instant ils sont là.
Hadji a 26 ans. D'une cabine, il appelle sa famille de temps à autre. C'est moins cher que de son portable. Il travaille dur pour pouvoir payer sa vie. "Rien que le loyer et la nourriture, c'est déjà cher". Il vient de déménager. Son colloc' tunisien va se marier. Hadji lui laisse les lieux. Et habite un peu plus loin de son travail maintenant. Il n'est pas très content. Mais obligé. Pour lui, c'est décidé : "Je ne compte pas rentrer au Bled. Je vais me marier ici. Vivre sans papiers ne me dérange pas." Ce sont ses mots, enfin, si je me rappelle bien.
On me raconte la même histoire presque tous les jours. Seuls les personnages changent. Mais le scénario est le même. Depuis mon arrivée en France, j'essaye de comprendre ces mentalités-là. J'essaye d'avoir plus de discussions avec ces jeunes qui refusent de rentrer dans leurs pays. Venir et disparaître dans la nature est le rêve de presque tous ces jeunes. Qui acceptent l'humiliation. Le mépris. Et la vie au noir.
La semaine d'avant, j'ai rencontré des Irakiens. Dans un magasin, Hussein est venu me parler. Il vient d'arriver en France suite à la guerre chez lui. Moi je comprends. La situation doit être impossible. Ses sentiments et tout ça, moi je veux les connaître. Il m'explique qu'il n'est pas envisageable de rentrer, que l'Irak n'existe plus, et comment la vie les a amenés ici. Hussein et ses deux amis partagent le même logement. Ils ne trouvent pas de travail. Grâce à leurs petites amies françaises, ils peuvent manger. Mais ils ne supportent plus cette vie. Hussein "ressemble à l'acteur égyptien Hany Salama", s'amuse-t-il. Il a le teint foncé et les cheveux noirs lissés.
Vivre clandestinement est une solution pour certains, une indignation pour d'autres. Ashraf est égyptien. Il travaille aussi dans le bâtiment. Il gagne sa vie et s'endort le soir, totalement épuisé. Il aide ses collègues égyptiens à trouver un emploi. Débrouillard. Il ne se lasse pas de cette situation. Il vit tranquillement. Sans se sentir en danger. Ashraf partage son toit avec plusieurs Egyptiens. Ici, ils s'aident. "Les Egyptiens viennent travailler dur pour quelques années, ils économisent tout, rentrent pour se marier et commencer une vraie vie chez eux", confie Hadji.
Pauvreté, guerres ou conditions de vie lamentables, ces gens quittent leurs pays pour le "paradis" : l'Occident. Ils se rendent compte trop tard qu'il n'y a pas de purgatoire et que c'est plutôt l'enfer. Ils tentent de tout faire pour vivre heureux mais ils ne le sont ni ici, ni chez eux.
Par: Noura Dardir